dimanche 21 juin 2015

couvertures 21 - Marcher sur la tête

Ici il sera question de la peinture la plus connue de l'artiste espagnol Eduardo Arroyo: Habillé descendant l'escalier (1976).
Peintre engagé dénonçant les régimes dictatoriaux, celui de Franco en particulier, la provocation est le maître mot de son oeuvre, à tel point qu'il est considéré comme le peintre le plus turbulent de la "figuration narrative" (mouvement artistique européen apparu dans les 60's).
N'échappant pas au regard critique de l'artiste, Habillé descendant l'escalier est une reprise satirique du Nu descendant un escalier de Marcel Duchamp (1912).




La peinture d'Arroyo a longtemps servi d'illustration de couverture d'un roman culte, La Conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole (écrit au début des 60's, mais publié seulement dans les 80's alors que l'écrivain s'est suicidé en 1969). Considéré comme l'un des romans les plus drôles de la littérature américaine, le texte, prix Pulitzer posthume en 1981, met en scène Ignatus, protagoniste à la carrure et aux manières totalement décalées avec l'Américain moyen. Ce personnage, qui semble véritablement marcher sur la tête, correspond assez à la toile d'Arroyo, choisie par les éditions de poche 1018 en 2002.


Mais la toile a également servi à illustrer l'ouvrage en format de poche de Lydie Salvayre, La Compagnie des spectres (Points, 1998) pour lequel elle avait reçu le prix Novembre en 1997 (Seuil). Le roman est une suite de récits narrés par une mère et sa fille à un huissier lors de la saisie de leurs biens, avec la Seconde Guerre mondiale en toile de fond. Véritables logorrhées de survie face à un homme totalement froid, les élucubrations des deux femmes traduisent des êtres humains à la limite de la folie.



Enfin, n’étant jamais aussi bien servi que par soi-même, la peinture illustre le texte autobiographique d'Arroyo paru aux éditions Grasset en 2010.


Les deux ouvrages au format de poche ont été rhabillés par leurs éditeurs respectifs et la peinture d'Arroyo ne figure plus en couverture de ceux textes très différents... Ce que je regrette beaucoup car, en tant qu'ancienne libraire, La Conjuration des imbéciles restera pour moi à jamais cet homme à l'envers.

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